Mahé Rabesa, correspondante de Trois-Rivières
10 septembre 2019
Suivez-moi pour découvrir un territoire atypique que vous ne visiterez peut-être pas. À moins que je ne vous en donne le goût?
C’est le 22 juillet que je quitte le port de Rimouski pour partir à la découverte de la région méconnue des Québécois: la Basse-Côte-Nord. C’est donc à bord du cargo-mixte “Bella Desgagnés” que j’ai pris la mer vers les communautés éloignées où le service pour répondre aux besoins de celles-ci est priorisé. Les passagers peuvent, tout au long du voyage, assister, émerveillés, aux déchargements des cargaisons, au va-et-vient des conteneurs, aux multiples manoeuvres du grutier et à l’accostage. Il n’y a pas que les passagers qui sont enchantés par l’arrivée du bateau, il y a aussi les villageois qui attendent avec impatience son arrivée au port. Pour eux, c’est une activité que de voir les nouveaux arrivants qui débarquent, les gens qui partent et la réception des denrées tant attendues. Parlant de cargaison, savez-vous ce que transporte le Bella? Eh bien de tout ce dont les habitants peuvent avoir besoin en passant par les médicaments, la nourriture, les machines à laver, les télévisions et même des voitures! Le Bella passe chaque semaine d’avril à janvier à ravitailler les villages côtiers. Voici donc l’itinéraire:
Premier arrêt: Sept-îles qui est un port de chargement, surtout pour les denrées périssables.
Deuxième arrêt: Port-Menier sur l’île d’Anticosti qui fut construit à la fin du 19e siècle par le chocolatier français Henri Menier. Les cerfs y font la loi et ils sont la célébrité de l’île.
Troisième arrêt: Havre St-Pierre, la dernière ville possédant une route.
Quatrième arrêt: Natashquan qui annonce la fin de la route 138 (sujet à de nombreux débats politiques) et village natal de Gilles Vigneault.
Cinquième arrêt: Kegaska, à environ 60 km à l'est du village de Natashquan. Le village est bâti sur une pointe de terre entre les baies Muddy et de Kegaska.
Sixième arrêt: La Romaine (Unamen Shipu), un village où la majorité de la population est Innue.
Septième arrêt: le village rendu célèbre par le film “La Grande Séduction”, soit le Harrington Harbor.
Huitième arrêt: Tête-à-la-baleine, un petit village où la pêche à la baleine a été célèbre durant les années 1850.
Neuvième arrêt: La Tabatière, une communauté anglophone issue de la migration de pêcheurs en provenance de Terre-Neuve.
Dixième arrêt: Saint-Augustin, en hommage à Augustin Le Gardeur Courtemanche (1663-1717). Sur une population d’environ 470 habitants, 97,3 % sont anglophones.
Onzième et dernier arrêt: Blanc-Sablon, un petit village où l’on parle anglais et français, situé à seulement 3 km de la frontière du Labrador.
Maintenant, je vais vous présenter mon top 3 des meilleurs arrêts.
3e position : Harrington Harbor qui se distingue des autres villages par l’inexistence de voitures. En effet, pour se déplacer, les habitants utilisent des quads tandis que les touristes optent pour la marche afin de découvrir le village. Il faut aussi souligner que les paysages sont à couper le souffle, car lorsque nous sommes au sommet du village, nous pouvons voir les maisons surplomber le golfe du fleuve St-Laurent. Lors de ma visite, j’ai pu voir l’église anglicane, l’école, le parc, l’héliport et les habitants aucunement ébranlés par l’arrivée de nombreux touristes. Harrington Harbor est une communauté anglophone issue de la migration de pêcheurs terre-neuviens.
2e position : Port-Menier. Menier est en réalité un industriel et aventurier français qui racheta l’île en 1895 afin d’y faire un paradis de chasse. C’est grâce à lui qu’aujourd’hui, il y a une telle diversité d’espèces sur l’île. Menier vint en tout 6 fois sur l’île avant de mourir en 1913. Aujourd’hui, l’île appartient aux Québécois; en effet, Anticosti fait partie des nombreux parcs de la Sépaq. Nous y retrouvons différentes activités qui, bien évidemment, plaisent aux pêcheurs et aux chasseurs. Mais les observateurs d’oiseaux, les randonneurs et les paléontologues trouveront eux aussi leur bonheur.
1ère position : La Romaine, de son vrai nom Unamen Shipu. Ce village est un des rares villages autochtones au Québec. Il compte environ 1050 habitants. Là-bas, j’ai pu découvrir une culture différente de la nôtre, mais moins éloignée que l’on pense. J’ai goûté à la confiture de chicoutai, un petit fruit orangé qui pousse juste sur la Côte-Nord. J’ai pu découvrir le village et son église, le rôle du Conseil de la communauté, l’hôpital, l’école secondaire et primaire, ainsi que la rivière aux saumons située non loin du centre du village et qui représente un lieu primordial pour son économie. En effet, le principal revenu économique est la pêche. Notre guide nous a expliqué qu’il y a deux croyances qui cohabitent chez les autochtones: le christianisme et le spiritualisme. Je trouve cela juste magnifique que deux croyances, semblant incompatibles, puissent coexister de cette façon.
Depuis quelques années, la région développe de plus en plus le tourisme afin de diversifier son économie. Tentez votre chance et partez à l’aventure, à la découverte de la Basse-Côte-Nord, une région peu connue des Québécois et pourtant si fascinante. Vous y découvrirez la flore de la toundra, contemplerez les montagnes à perte de vue, entendrez le calme de la nature et le ronronnement des turbines; vous sentirez l’air salin à plein nez, goûterez les innombrables saveurs de la mer et toucherez à ce qui se rapproche le plus du bonheur: voyager.
Crédit photo: Mahé Rabesa (c) 2019
Merci Mahé de nous faire voyager dans un beau coin de notre province, trop souvent négligé. Tu m'as offert des morceaux de rêve car j'ai toujours espéré visiter le nord (et nord-est) du Québec. Ça me rappelle toujours une parole de "Terre de soleil" de Plume Latraverse : "J'ai rapporté dans mes bagages, un peu de paysage". Plume est comme la 138 ... un génial artiste mé- ou mal- connu ... https://genius.com/Plume-latraverse-terre-de-soleil-lyrics . Bravo Mahé!